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Les Anges Vagabonds
29 décembre 2006

Lucid Trip Part I

Si je voulais raconter cette histoire, je ne saurais même pas par où commencer, tant cette rencontre fut pour moi bouleversante. Bouleversante, pas dans le sens, les larmes coulent, votre souffle devient irrégulier et le lendemain tout va bien. Non, disons bouleversante dans le sens où en quelques instants une personne, qui parait totalement ordinaire, vous apporte une réponse avec une facilité déconcertante à une question que vous vous posez depuis toujours. Peut être seulement depuis que vous avez pu admirer dans la glace de votre salle de bains ce magnifique premier poil qui venait de pousser sous votre bras. Quoi qu’il en soit c’est le genre de question qu’on essaye d’oublier en grandissant. Le genre de question qui a toujours provoqué chez nous un malaise imperceptible, la sensation qu’un gouffre s’ouvre sous nos pieds. Peut être parce que cette question est simplement une question sur la vie. On peut en rire bien sûr. On peut tenter de repousser cette idée en traitant tout ça de foutus balivernes. Mais  nous restons intrigué, inévitablement. Aussi profondément que nous ayons enterré ces questions, elles n’en sont pas moins là, en nous même. C’est un peu ce que je pensais avant de m’asseoir dans ce foutu canapé.

Ce jour là, après un petit déjeuner des plus étranges - où je fixais ma tartine de beurre en me demandant comment celle-ci pouvait avec une facilité déconcertante accepter le sort qui lui était réservée -, je me sentis tout à coup épris d’une sensation tout à fait nouvelle. Quand j’y repense maintenant, les paroles de Dean ont pris en cet instant là tout leur sens caché. « C’est la concrétisation de ces facteurs qui dépendraient au premier chef de la dichotomie de Schopenhauer pour une part intimement accomplis… ». Et de surcroît il avait totalement raison. Ces putains de problèmes qui se présentent à votre esprit sans demander la permission d’entrer dans votre tête, qui vous triturent les neurones de l’intérieur sans même que vous sachiez de quoi ils retournent.

En tout cas les faits étaient là, et je pris la décision de faire mon sac et de partir sur le champ. Je savais que je trouverais des réponses ailleurs et pas devant ma tartine de pain beurre qui c’était soudainement mise à parler et même à chanter sur un vieil air de Céline Dion. Je quittais mon appartement sans regarder derrière moi, ce qu’à priori tout les gens normaux font quand ils sortent de chez eux, mais là c’était différent. Je tirais de ma poche un magnifique pouce fraîchement nettoyé et fraîchement manucuré, que je tendais aux passants en marchant sur le bord de la route. D’après une étude sérieuse d’un scientifique canadien que j’avais pu lire dans un magazine récent, il était démontré qu’il était plus facile de se faire prendre en stop avec les mains propres et les ongles bien coupés. J’appliquais donc à la lettre ces nouveaux principes sachant que de toute façon, je n’avais rien à perdre. Et le plus fou c’est que ça marchait. Je n’eu qu’à attendre une dizaine de minutes avant que quelqu’un ne s’arrête à coté de moi et accepte de me prendre sur son dos. C’était un type vachement sympa, Henry Dales, un hobbit de la contrée ouest qui partait rejoindre sa femme et ses deux filles dans une ville du nord. Nous nous séparâmes au niveau de Green Wood. Je descendais de son dos, le remerciais de m’avoir porter jusque là et décidais de m’arrêter un moment.


La région était réputée pour sa bière et ses drogues de fort bonne qualité. Bien qu’à l’époque je n’avais pas encore expérimenté mes trips mystiques les plus insolites, j’étais excité de pouvoir trouver ici quelques portes ouvrant sur des matrices parallèles. Raoul Duke l’avait bien dit, il faut à tout voyageur des chaussures de golf si celui-ci veut survivre aux affres de son voyage. J’en trouvais de très belles que je payer huit dollars à un marchand irlandais. Ce qui me laissait trois dollars pour prendre un bon petit déjeuner mais sans tartine de beurre cette fois. Complètement rassasié, je décidais de faire une sieste. Je trouvais un champ de coquelicot à proximité. Je me réveillais deux heures plus tard prêt à reprendre la route.


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